Lied de la nuit
Lied de la nuit
Et soudain
vient la nuit
comme une huile
de silence et de peine.
A son courant je m'abandonne
à peine armé
du précaire filet
de souvenirs tronqués et de nostalgies
qui s'acharnent encore
à recouvrer le territoire
perdu de leur royaume.
Comme des leurres ivres
tournent dans la nuit
noms, demeures,
carrefours, places,
pâturages, fleuves
et filles,
tournent en vain
dans le frais silence de la nuit
et nul ne répond à leurs appels.
Broyé et vaincu
les premières rumeurs
de l'aube me sauvent,
quotidiennes et insipides
comme la routine des jours
qui ne seront plus
le printemps fiévreux que jadis
nous nous étions promis.
Alvaro Mutis "Et comme disait Maqroll el Gaviero"